Conférence au "Youth Camp for Green, Peace and Alternative
movements"
(Allemagne, juillet 2001)
THEORIES DE L'IMPERIALISME AMERICAIN :
LA
REPONSE DES PEUPLES
par Luc MICHEL
LES
USA SEULE SUPERPUISSANCE
En 1991 commence une nouvelle ère pour les
relations internationales.
La situation mondiale est en effet totalement
changée. L'URSS, le principal challenger de Washington, qui fut aussi, il faut
le dire, longtemps son meilleur complice, a disparu, vaincue par la compétition
économique et la course aux armements qu'elle s'était laissée imposées par
Washington.
En l'espace de quelques mois, la puissance
américaine est devenue l’unique superpuissance mondiale et tente partout
d'imposer son "Nouvel Ordre Mondial"
(NOM) avec son cortège de guerres et d'inégalités.
Les théoriciens de l'impérialisme américain
défendent à ce sujet la thèse du hasard. Les Etats-Unis se seraient trouvés dans
leur position centrale et omnipotente par l'effet d'une série de conjonctions
heureuses. Mais en rien la politique planétaire des USA ne serait responsable de
cette situation d'hégémonie, résultant d'une divine surprise.
DOCTRINES DE L'IMPERIALISME AMERICAIN
Cette thèse est totalement fausse et contredite
par toute étude historique sérieuse.
L'impérialisme américain est planifié, pensé,
théorisé depuis plus d'un siècle. Et la victoire incontestable de 1991 est
l'aboutissement d'une politique conçue dès la fin du XIXeme siècle.
Le premier grand théoricien de cette vision
impérialiste qui vise à la domination mondiale est l'amiral Alfred T. Mahan, dont le livre
principal "The influence of sea power
upon history" est publié à Boston en 1890.
Alfred T. Mahan (1840-1914) a construit une
géopolitique destinée à justifier l'expansionnisme mondial des Etats-Unis à une
époque où le monde est encore dominé par la Grande-Bretagne, un expansionnisme
qui doit se fonder sur la puissance maritime ("sea
power"). Mahan est convaincu que les Etats-Unis, puissance industrielle
contrôlant les Amériques, peuvent, en imitant la stratégie maritime qui fut
celle de l'Angleterre à partir du XVIème siècle, obtenir la domination mondiale
grâce à la maîtrise des mers. Il leur faut pour cela non seulement des bases,
des ports, mais surtout des bâtiments, des navires, qui soient en permanence
capables d'intervenir partout dans le monde, et donc constamment opérationnels.
Donc, en 1897, Mahan préconise la politique
stratégique suivante : il faut s'allier à la Grande-Bretagne pour contrôler les
mers, il faut maintenir l'Allemagne sur le continent européen et s'opposer à son
développement maritime et colonial, il faut associer les Américains et les
Européens pour combattre les ambitions des asiatiques et en particulier
surveiller de près le développement du Japon.
Tous les grands thèmes du "grand échiquier" de Zbigniew
Brzezinski sont déjà présents : stratégie planétaire, intervention en Europe,
isolement de la puissance continentale (alors l'Allemagne).
Mahan donne un corps idéologique à la vision
américaine d'une mission prédestinée des USA dans le monde : la "manifest destiny".
Son oeuvre est continuée par Nicholas J. Spykman (1893-1943), qui
développe la notion de "containment", consistant à
organiser un système d'états-tampons destiné à briser la
puissance russe. Après la victoire sur l'Allemagne il faut donc contrôler ces
Etats tampons qui constituent le rimland, le pivot (une notion de
géopolitique), si l'on veut contrôler le cœur du monde.
Cette nécessité conduira à la mise en place d'une
politique d'endiguement (containment) de par la constitution
de l'Alliance atlantique dominée par les Etats-Unis, face au Pacte de Varsovie,
dominé par la Russie soviétique. Notez que tout cela est pensé en 1941 et 42 -
Spykman meurt en 1943 - c'est-à-dire au moment même ou l'URSS fait face aux
armées nazies.
Le discipline de Spykman est Georges F. Kennan, le principal
théoricien américain de la guerre froide, auteur de "The sources of soviet conduct".
Le plus brutal théoricien de l'impérialisme
américain est James Burnham. Moins
connu en dehors des spécialistes des sciences politiques (c'est le père des néo-machiavéliens américains), c'est un
ancien trotskyste reconverti dans le néo-conservatisme. Il fonde notamment la
"National Review"
En 1945, il publie un livre fondamental mais passé
inaperçu en Europe dont le titre anglais est "The Struggle for the World". Le titre
de l'édition française (1947) est lui plus explicite encore : c'est "Pour la domination mondiale". Burnham
y donne les conditions de la puissance destinée à assurer la domination
planétaire des Etats-Unis.
DE
NOUVELLES THEORIES AMERICAINES APRES 1991
La victoire américaine de 1991, qui est largement
surestimée dans les cercles conservateurs qui entourent le président Bush, va
donner lieu à une nouvelle théorisation de l'impérialisme yankee. Les proches
conseillers de Bush en donnent immédiatement une nouvelle définition : c'est le
"Nouvel Ordre Mondial" au nom duquel
les USA reçoivent la mission de "pacifier" le monde et d'y imposer les
pseudo-valeurs du "libre
commerce".
Les principaux théoriciens de l'impérialisme
américain à l'aube du XXIeme siècle sont Francis Fukuyama, Samuel P. Huntington
et Zbigniew Brzezinski.
Leurs théories, médiatisées par leurs livres et
leurs articles dans les grandes revues américaines de politique internationale,
prennent place dans un ensemble de recherches et d'activités liées directement
au Pentagone et au State Department.
En apparence, elles présentent des contradictions
entre elles mais celles-ci ne sont qu'apparentes. Elles sont en effet plus liées
qu'il n'y parait car elles représentent différents niveaux de la même pensée,
notamment quand à leur projection dans le temps.
Fukuyama est le théoricien de la "fin
de l'histoire" où il prophétise que le "dernier homme" sera celui de la
vision idéologique américaine. On présente souvent les thèses de Fukuyama comme
une vision trop optimiste liée à la victoire de 1991 et donc dépassée. C'est
ignorer les travaux ultérieurs de cet auteur. Fukuyama représente au contraire
la vision à long terme de l'impérialisme yankee. Celle de ses buts ultimes.
Huntington théorise les justifications
idéologiques de l'affrontement de Washington avec le reste du monde. C'est une
oeuvre à moyenne vision - les trois ou quatre prochaines décennies - destinée
bien plus aux alliés supposés de Washington qu'au public américain. Ses théories
sur "le choc des civilisations" visent à
dissimuler les pratiques cyniques de la politique internationale américaine et à
fournir une justification à une nouvelle politique de "containment", qui vise surtout la
Russie et la Chine mais aussi l'Europe en voie d'unification, et à pérenniser
celle-ci.
Disciple de Henry Kissinger, souvent qualifié de "Richelieu américain" pour sa politique
cynique et réaliste, Brzezinski donne, lui, les conditions de la puissance
américaine, destinées à assurer une domination planétaire durable. C'est la
théorisation géopolitique de l'impérialisme américain.
Dans ces théories on trouve un curieux mélange de
cynisme, de brutalité et de faux moralisme. C'est la traduction au XXIeme siècle
de la "manifest destiny". Les USA ont une
mission à accomplir. Ce qui est bon pour eux est bon pour le monde. Et le "libre commerce" assurera la paix
mondiale. Chez Brzezinski cela frise parfois la caricature, les plus brutales
théories géopolitiques voisinant avec des réflexions idéalisantes sur la paix et
le bonheur des peuples.
FRANCIS FUKUYAMA : LA "FIN DE L'HISTOIRE"
Francis Fukuyama publie en 1992 "La fin de l'Histoire et le dernier
homme", où il développe la fameuse thèse qu'il avait émise en 1989 dans la
revue «The National Interest».
Qu'entend Fukuyama par «fin
de l'histoire» ? A la suite des philosophes Hegel et Kojève, il
considère que l'histoire résulte des antagonismes entre les différentes
idéologies et formes d'organisations sociales, qui luttent chacune pour la
reconnaissance. Or, avec la chute du Mur, l'effondrement du communisme et la
victoire de la démocratie libérale, l'histoire, prise dans ce sens, s'abolit.
Preuve est faite que le destin de l'humanité, c'est la démocratie libérale
moderne, idéologie politique de l'impérialisme américain, qui, à défaut d'être
parfaite, offre selon Fukuyama le meilleur des mondes possibles.
En 1997, avec "La confiance et la puissance", Francis
Fukuyama précise sa pensée et souligne que la majorité des nations s'oriente
politiquement vers la démocratie et économiquement vers l'économie de marché.
Dans ce nouveau livre, il développe une justification idéologique de la
supériorité du modèle social américain et entreprend de démontrer qu'une
corrélation existe entre «vertus sociales et prospérité
économique», celles-là engendrant celle-ci. L'Etat-providence ayant dû
battre en retraite. Il y prétend qu'il y a des pays plus aptes que d'autres au
développement. Il oppose les sociétés familiales, comme la France, l'Italie ou
la Chine, à faible degré de confiance généralisée, ce qui implique une forte
intervention de l'Etat, et les sociétés de confiance, automatiquement plus
prospères, comme le Japon, l'Allemagne et les Etats-Unis.
Mais Fukuyama est surtout l'idéologue du projet de
société américain à long terme, qu'il prétend être l'avenir ultime de
l'humanité. C'est tout simplement l'accomplissement ultime de la "manifest destiny". Et c'est surtout
une vision de cauchemar d'une société où le Politique et l'homme en tant
qu'acteur de l'Histoire ont disparu, où le destin des hommes et des peuples est
remplacé par un monde unifié, gris et sale, où le consumérisme accompli tient
lieu d'ultime horizon. Alors triomphera le dernier Homme, plus soucieux
d'assurer son bien-être que d'affirmer sa valeur par des oeuvres géniales ou par
des guerres.
Dans une interview retentissante au quotidien "Le
Monde" (Paris) du 17 juin 1999, Fukuyama précise sa vision du "dernier homme",
qui est incontestablement "la fin de l'histoire" : "Le
caractère ouvert des sciences de la nature contemporaines nous permet de
supputer que, d'ici les deux prochaines générations, la biotechnologie nous
donnera les outils qui nous permettront d'accomplir ce que les spécialistes
d'ingénierie sociale n'ont pas réussi à faire. A ce stade, nous en aurons
définitivement terminé avec l'histoire humaine parce que nous aurons aboli les
êtres humains en tant que tels. Alors commencera une nouvelle histoire, au-delà
de l'humain."
C'est brutalement exposé le projet de société
ultime de l'oligarchie américaine.
Dans la même interview, il précise par ailleurs la
continuité de sa thèse sur "la fin de l'histoire" avec son projet orwellien de
société : "Quand j'ai publié "La fin de l'histoire",
en 1992, j'ai été submergé de critiques, mais je ne parlais pas de la même
histoire que mes censeurs. Je voulais dire qu'avec l'écroulement du bloc de
l'Est, de nombreuses questions fondamentales sur le plan de l'idéologie et des
institutions qui avaient sous-tendu l'histoire pendant des décennies ont été
plus ou moins réglées, du moins dans les pays développés. Aujourd'hui, les vrais
problèmes se situent au niveau des structures sociales, religieuses, et de la
culture."
L'homme sera alors devenu un "chien heureux" constate Fukuyama :
«Un chien est heureux de dormir au soleil
toute la journée, pourvu qu'il soit nourri, parce qu'il n'est pas insatisfait de
ce qu'il est. Il ne se soucie pas que d'autres chiens fassent mieux que lui, ou
que sa carrière de chien soit restée stagnante. Si l'homme atteint une société
dans laquelle il aura réussi à abolir l'injustice, sa vie finira par ressembler
à celle du chien».
Fukuyama reste muet sur ceux qui seront les
maîtres de ces chiens heureux, qui les tiendront en laisse ...
HUNTINGTON ET LE "CHOC DES CIVILISATIONS"
Samuel P. Huntingtonest venu corriger Fukuyama, le
compléter. La fin de l'Histoire n'étant pas immédiate et les peuples étant
résistants au "Nouvel Ordre Mondial" et à son
horizon avilissant de "chiens
heureux", il fallait théoriser les affrontements persistants et persuader
les alliés plus ou moins forcés de Washington du bien fondé de la domination
planétaire du système américain.
Professeur à l'Université d'Harvard, Huntington
dirige le "John M. Olin Institue for
Strategic Studies" et a été expert auprès du Conseil National Américain de Sécurité
sous l'administration Carter. Il est aussi le fondateur et l'un des directeurs
de la revue "Foreign Policy", où ont été exposées initialement ses thèses sur le
choc des civilisations.
Il publie en 1996 "The clash of civilizations and the remaking of world order".
Il faut noter qu'il n'est nullement l'inventeur de
sa thèse. En effet, le professeur marocain (Université Mohamed V de Rabat) Mahdi Elmandjra revendique
l'antériorité de la prophétie exposée à propos de la guerre du Golfe dans son
ouvrage "Première guerre
civilisationnelle" (Casablanca, 1992). Il emprunte aussi les thèses de
l'historien français Braudel sur la
pérennité des civilisations sur les Etats et les Nations.
Selon Huntington : "L'histoire des hommes, c'est l'histoire des
civilisations, depuis les anciennes civilisations sumériennes et égyptiennes
jusqu'aux civilisations chrétiennes et musulmanes, en passant par les
différentes formes des civilisations chinoises et hindoue". On distingue
généralement, nous dit Huntington, la "civilisation", un concept français du
XVIIIème siècle qui s'oppose au concept de "barbarie", des "civilisations", un
concept anthropologique qui s'applique à "l'entité culturelle la plus large que l'on
puisse envisager".
"Les
empires naissent, nous dit-il, et meurent, alors que les civilisations
"survivent aux aléas politiques, sociaux, économiques et même idéologiques"
(Braudel), pour en définitive succomber à l'invasion de
tiers".
Huntington nous dit que pendant trois mille ans
les civilisations séparées par le temps et par l'espace se sont ignorées. Puis
la civilisation occidentale domina le monde jusqu'au XXème siècle. Mais
l'influence de l'Occident ne cesse de se réduire : "la
puissance économique se déplace vers l'Extrême-Orient, dont l'influence
politique et la puissance militaire vont croissant. L'Inde est en passe de
décoller. L'hostilité du monde musulman va croissant envers l'occident dont les
sociétés non occidentales n'acceptent plus comme jadis les diktats et les
sermons". "Peu à peu l'Occident perd sa confiance en soi et sa volonté de
dominer".
L''Occident restera le numéro un mondial pendant
le XXIème siècle, mais inéluctablement "l'occident continuera à décliner"
et "sa prépondérance finira par
disparaître".
Donc conclut Huntington, "l'affrontement est programmé" au travers de "guerres civilisationnelles" entre la civilisation Occidentale et les autres civilisations du Monde. Parmi les adversaires principaux de l'Occident américain, les civilisations orthodoxe, islamiste et confucéenne (Chine et Asie).
QUELS BUTS REELS POURSUIT HUNTINGTON
Le point de vue de Huntington est radicalement
contesté, notamment par les Français Chauprade et Thual, dans leur "Dictionnaire de géopolitique" (1998)
pour lesquels "en globalisant les aires religieuses, on en
vient à ignorer les fractures internes inhérentes à ces espaces
civilisationnels". Ils ajoutent que "L'unité de l'Islam tient plus de la fiction
que de la réalité" et accusent Huntington de faire du "simplisme et du manichéisme". "La
centralité des mécanismes géopolitiques repose en première instance sur les
continuités des Etats", concluent-ils.
Cette critique a un défaut : celui de ne pas
rechercher le but des thèses de Huntington et leur rôle dans la diffusion et la
défense de l'impérialisme américain. Car Huntington vise un but opérationnel
direct : théoriser et justifier la confrontation entre les Etats-Unis et le
reste du monde.
Certaines réactions ne laissent aucun doute.
Kissinger voit dans "Le choc des civilisations" "le
livre le plus important depuis la fin de la guerre froide" et Brzezinski
"un tour de force intellectuel : une oeuvre
fondatrice qui va révolutionner notre vision des affaires
internationales". Huntignton a en effet à leurs yeux le mérite de
proposer une vision des civilisations qui recoupe étroitement les conceptions
géopolitiques des deux penseurs américains.
Sa vision de l'Occident qui unit étroitement et
indissolublement Etats-Unis et Europe occidentale pérennise la main-mise
américaine sur notre continent.
Sa thèse sur la civilisation orthodoxe, radicalement
séparée de l'héritage gréco-romain commun partagé avec l'Europe occidentale et
centrale, empêche toute union eurasienne de l'Atlantique à
Vladivostok et combat les thèses sur la "Troisième Rome" et la mission de la
Russie, antithétique de la "manifest destiny" américaine. Elle
confine la Russie au mieux à un rôle de puissance régionale et au pire, un pire
souhaité et théorisé à Washington, au démembrement. Ce n'est nullement un hasard
si Brzezinski a fait paraître dans la revue de Huntington en 1999 un article
proposant le démembrement de la Russie en trois états (Russie occidentale,
Caucase et Sibérie). Un article qui répond directement aux thèses eurasiennes
adoptées par le président Poutine et qui fit scandale en Russie, où l'on
souligna que ce projet était déjà celui de Hitler et de Rosenberg, le théoricien
nazi du racisme.
Enfin, l'opposition proclamée entre Occident et islamo-confucéens empêche tout
rapprochement euro-arabe et toute union méditerranéenne. Huntington oublie là
fort à propos l'utilisation par Washington d'un certain islamisme radical contre
l'Europe (Bosnie, Albanie), la Russie (Afghanistan, Tchétchénie, etc.) et les
pays arabes opposés à sa politique, comme la Libye ou l'Irak.
LE
"GRAND ECHIQUIER" DE BRZEZINSKI
Après l'idéologie avec Fukuyama et l'Histoire
comme fondement opérationnel de l'action avec Huntington, le troisième grand
théoricien de l'impérialisme américain au XXIeme siècle est Zbigniew Brzezinski dont le domaine est
la géostratégie et la géopolitique et qui publie "The Grand Chessboard" en 1997, titré
"Le grand échiquier. L'Amérique et le
reste du monde" pour son édition française.
Disciple de Henry Kissinger et adepte de la "real
politique" comme lui, Brzezinski, d'origine polonaise, est expert au Center for Strategic and International
Studies (Washington DC) et professeur à l'Université Johns Hopkins de Baltimore.
Il fut conseiller du président des Etats-Unis de 1977 à 1981.
La réflexion de Brzezinski est centrée sur les
conditions géopolitiques de la puissance américaine et de son contrôle sur l'Eurasie, le "grand échiquier" où Washington doit
éliminer tout rival potentiel ou réel.
Nous avons vu que Huntington n'était pas le
créateur du concept des "guerres
civilisationnelles" emprunté à un professeur marocain. De même, Brzezinski
s'inspire largement des Théories de Jean
Thiriart.
D'origine belge, Thiriart est méconnu en Europe
occidentale où l'impasse a été faite sur ses thèses. Il n'en va pas de même eu
Russie où il inspire aussi bien les théories géopolitiques et économiques des nationaux-communistes de Ziouganov que les concepteurs des thèses eurasistes mises à l'honneur
par le président Poutine. Le manuel d'instruction géopolitique pour les
officiers russes lui consacre un long chapitre élogieux. Au début des Années 80,
Thiriart fonde l'école
"euro-soviétique" où il prône une unification continentale de Vlazdivostok à
Reykjavik sur le thème de "l'Empire euro-soviétique" et sur
base de critères géopolitiques.
Théoricien de l'Europe unitaire, Thiriart a été
largement étudié aux Etats-Unis, où des institutions universitaires comme le Hoover Institute ou l'Ambassador College (Pasadena) disposent
de fonds d'archives le concernant.
Ce sont ses thèses anti-américaines "retournées"
que reprend largement Brzezinski, définissant au bénéfice des USA ce que
Thiriart concevait pour l'unité continentale eurasienne.
Le succès médiatique des emprunts de Huntington ou
de Brzezinski comparé au silence pesant qui entoure en Occident des théoriciens
comme Thiriart s'explique par le monopole médiatique américain. A l'antique "ex Oriente lux" a visiblement succédé
un "Ex America lux".
LES THESES
GEOPOLITIQUES DE MACKINDER, SPYKMAN ET
THIRIART
La géopolitique, science née en Allemagne
à la fin du XIXeme siècle, doit beaucoup aux concepts de Mackinder et de
Spykman.
L'amiral britannique H.J. Mackinder (1861-1947), qui fut
professeur de géographie à Oxford
puis à la London School of Economics and
Political Science, est le fondateur de la géopolitique classique, celle qui
oppose la terre et la mer. Il est
connu notamment pour être l'auteur de la théorie selon laquelle il existerait au
début du XXème siècle un "pivot géographique du monde", le
cœur du monde (heartland) protégé par des obstacles
naturels (le croissant intérieur, inner crescent, composé de la
Sibérie, du désert de Gobi, du Tibet, de l'Himalaya) et entouré par les océans
et les terres littorales (coastlands).
Ce cœur du monde, c'est la Russie, la Russie qui
est inaccessible à la puissance maritime qu'est la Grande-Bretagne. C'est
pourquoi le cœur du monde doit être encerclé par les alliés terrestres de la
Grande-Bretagne. La Grande-Bretagne doit contrôler les mers mais également les
terres littorales qui encerclent la Russie, c'est à dire l'Europe de l'Ouest, le
Moyen-Orient, l'Asie du sud et de l'Est. La Grande-Bretagne elle-même, avec les
Etats-Unis et le Japon, constituent le dernier cercle qui entoure le cœur du
monde.
Selon Mackinder ce
qu'il faut absolument éviter c'est l'union de la Russie et de
l'Allemagne, un concept que Thiriart modernisera en "Empire euro-soviétique", la
constitution de ce que Mackinder appelle l'île mondiale (world island), un puissant Etat
ayant d'immenses ressources et de vastes étendues terrestres, ce qui permettrait
à la fois d'avoir de grandes capacités territoriales de défense et de construire
une flotte qui mettrait en péril l'Empire britannique.
Dès la fin du XIXeme siècle, l'école géopolitique américaine, dont les
têtes de file sont Mahan et Spykman, entendra substituer les Etats-Unis à la
Grande-Bretagne en tant que puissance maritime hégémonique.
Disciple critique de Mahan, Nicholas J. Spykman est son
continuateur en même temps que le continuateur partiel et dissident de
Mackinder. Comme le Britannique Mackinder, N.J. Spykman pense que le monde a un
pivot. Mais ce pivot du monde n'est pas le heartland de Mackinder, la Russie. Le
pivot du monde est composé des terres littorales (les coastlands de Mackinder) qu'il
appelle le bord des terres, l'anneau des terres (rimland), ces terres constituant un
anneau tampon entre le cœur, qui est soit la Russie soit l'Allemagne, et la
puissance maritime britannique. Ces Etats tampons furent, par exemple,
la Perse et l'Afghanistan utilisés par l'Angleterre contre la Russie entre le
XIXème et le XXème siècle, comme la France fut utilisée contre l'Allemagne entre
la deuxième moitié du XIXème siècle et la deuxième guerre mondiale.
Après la victoire sur l'Allemagne - Spykman écrit
avant 1943 - il faut donc contrôler ces Etats tampons qui constituent
le rimland, le pivot, si l'on veut contrôler le cœur du monde. Cette
nécessité conduira à la mise en place d'une politique d'endiguement (containment) de la Russie
soviétique, l'Europe de l'Ouest et la Turquie servant d'Etats tampons pour les
Etats-Unis.
Fondateur de l'"Ecole euro-soviétique" au début des
Années 80, Jean THIRIART développe
le thème de la dimension vitale des Etats nécessaire pour
garantir leur indépendance et qui requiert à l'époque moderne la taille des
états continentaux. Théoricien de l'Etat
unitaire paneuropéen, THIRIART étudie les causes de l'échec de l'Union
Soviétique, qu'il pressent dès 1980 et dont il stigmatise le fédéralisme. Face à
la superpuissance américaine, il plaide pour la fusion de la Russie (sur ses
frontières sibériennes en Orient) avec l'Europe occidentale dans le cadre d'un
Empire unitaire allant de Reykjavik à Vladivostok et du Groenland au
Sahara.
Géopoliticien de l'Empire européen, Jean THIRIART
axe ses réflexions sur l'intégration de la Russie et de l'Europe occidentale
dans un Etat continental eurasien unitaire.
1.
THIRIART insiste sur le fait capital que tous les états issus de
l'implosion de l'URSS, sans aucune exception, doivent faire partie de l'Europe.
Les frontières orientales, caucasiennes et sibériennes, de l'URSS devront demain
être celles de la Grande-Europe.
2.
THIRIART développe sa thèse sur la construction de l'Europe contre les
Etats-Unis et son bras armé de l'OTAN. L'Europe unitaire se fera dans le cadre
d'une guerre de libération nationale contre l'occupant américain et ses
collaborateurs "européens".
3.
THIRIART insiste sur la nécessité de l'organisation économique de
l'Europe sur une base autarcique, reprenant les théories de Friedrich LIST.
4.
THIRIART dénonce les vues limitées des politiciens européens, qui à la
suite du général de Gaulle, envisagent une Europe tronquée jusqu'à l'Oural.
L'Empire européen devra inclure la Sibérie et l'extrême-orient
ex-soviétique.
5.
THIRIART s'en prend aux conceptions de l'Europe basées sur la religion ou
des théories pseudo-racistes. Ce sont les impératifs de la Géopolitique et de la
Géoéconomie qui déterminent les dimensions de la Grande-Europe et par-là les
populations qu'elle unifiera dans un Etat unitaire. Pour lui, par exemple, la
Turquie c'est aussi l'Europe. Il insiste à ce sujet sur l'exogamie au sein de
peuple européen.
6.
THIRIART qui conçoit l'Empire européen comme une nouvelle Rome, la quatrième Rome qui fait écho au concept
messianique russe de la "troisième Rome" (Moscou après Rome
et Byzanze), expose la nécessité de faire de la Méditerranée un Lac européen,
une nouvelle "Mare nostrum". Dans sa
conception géopolitique de l'Europe unifiée, les deux rives de la Méditerranée,
avec leurs populations, font partie de l'Europe, dont les frontières sud sont
sur le Sahara.
LES
FONDEMENTS GEOPOLITIQUES DE LA PUISSANCE AMERICAINE
Brzezinski s'inspire directement de ses théories
pour définir les conditions de la puissance américaine au XXIeme siècle, la
maintenir dans son rôle hégémonique de garants du "Nouvel Ordre Mondial" et pérenniser
la sujétion de l'Europe occidentale.
Pour maintenir leur leadership, qui n'est rien
d'autre que la domination mondiale annoncée par
Burnham, les USA doivent avant tout maîtriser le "grand échiquier" que représente
l'Eurasie, où se joue l'avenir du monde.
Cette maîtrise repose sur la sujétion de l'Europe
occidentale, étroitement liée aux USA dans un ensemble politico-économique
occidental, la communauté atlantique cadenassée par l'OTAN. Thiriart parlait de
l'OTAN non comme d'un bouclier mais d'un harnais pour l'Europe.
Elle repose aussi sur l'isolement de la Russie
qu'il faut affaiblir irrémédiablement et démembrer.
Le danger mortel pour les USA, puissance
extra-européenne à l'origine de par sa situation même, serait d'être expulsée
d'Europe occidentale, sa tête de pont en Europe. Dans cet objectif, tout
rapprochement de l'Europe et de la Russie, toute union eurasienne, sans même
parler de fusion comme l'évoquait Thiriart, doit être empêchée par tous les
moyens.
Zbigniew Brzezinski écrit : "L'Europe est la tête de pont géostratégique
fondamentale de l'Amérique. Pour l'Amérique, les enjeux géostratégiques sur le
continent eurasien sont énormes. Plus précieuse encore que la relation avec
l'archipel japonais, l'Alliance atlantique lui permet d'exercer une influence
politique et d'avoir un poids militaire directement sur le continent. Au point
où nous en sommes des relations américano-européennes, les nations européennes
alliées dépendent des Etats-Unis pour leur sécurité. Si l'Europe s'élargissait,
cela accroîtrait automatiquement l'influence directe des Etats-Unis. A
l'inverse, si les liens transatlantiques se distendaient, c'en serait finit de
la primauté de l'Amérique en Eurasie."
DIVISER POUR REGNER : LA "KLEINSTAATEREI"
Nous avons déjà évoqué le rôle de Henry Kissinger
comme "Richelieu américain". Ce n'est nullement une figure de rhétorique. Le Cardinal de Richelieu est le Premier
ministre de la France au moment où la Guerre de trente ans ravage la Mittel
Europa. Son but est d'assurer à la France des Bourbons la domination en Europe
en neutralisant l'Allemagne et l'Empire des Habsbourg, tant en Espagne qu'en
Allemagne. Menant une politique cynique et opportuniste, Richelieu transforme
une guerre de religion entre protestants et catholique en un grand embrasement
dont la France sort victorieuse lors du Traité de Westphalie (1648). Sous
prétexte de préserver les "libertés germaniques", la France
impose le démembrement du Reich germanique en plusieurs centaines de micro-états
non viables. La France, état unitaire, a ainsi assuré sa prédominance en Europe
jusqu'au début du XIXeme siècle. L'historien allemand Frédéric Grimm évoque à ce propos dans
son livre "Le testament de
Richelieu" de concept de "kleinstaaterei".
La leçon n'a pas été perdue pour les Etats-Unis.
Aujourd'hui, sous prétexte de préserver les droits des peuples - les nouvelles
"libertés européennes" -, Washington impose la "kleinstaaterei" en Europe, dans les
Balkans, le Caucase et en Russie même.
Depuis 1943, les Etats-Unis théorisent et
favorisent le démembrement et la fragmentation des grands états. En 1945, Morgenthau, conseiller de Roosevelt,
prône le morcellement de l'Allemagne et sa désindustrialisation. La partition de
fait en résulte. On ignore souvent que Staline était opposé à la division de
l'Allemagne et proposa jusqu'en 1948 une Allemagne unifiée et neutre.
Ici la géopolitique se rapproche du courant "réaliste" des relations
internationales, dont un des fondateurs le plus célèbre est Hans J.
Morgenthau, dont elle partage nombre de postulats
Depuis 1989, les Etats-Unis multiplient leur
soutien à l'éclatement des Etats dans les Balkans et en Europe orientale.
L'éclatement de l'Union soviétique et de la seconde Yougoslavie en résulte
directement. Une nouvelle étape voit aujourd'hui le démembrement de la troisième
Yougoslavie née en 1991. Et Brzezinski vise enfin au démembrement non seulement
de la Fédération de Russie mais aussi de la Russie historique elle-même en trois
entités.
Et c'est là qu'intervient Huntington, dont le rôle
est de fournir des justifications historiques à cette politique. Comparer la
vision géopolitique de l'Europe de Brzezinski à la théorie des aires de civilisation de Huntington
est à ce sujet éclairant.
Il convient ici de dresser un autre parallèle :
celui des théses de la géopolitique nazie - dont le principal théoricien fut Alfred Rosenberg, l'auteur du "Mythe du XXeme Siècle" - avec les
projets des Etats-Unis en Europe. Le même plan est appliqué que ce soit dans les
Balkans ou contre la Russie. Et les alliés privilégiés actuels de Washington
étaient ceux du IIIeme Reich entre 1935 et 1944.
ROME
OU CARTHAGE ?
On parle souvent d'"Empire américain". Vous aurez
remarqué que je répugne à employer ce terme. Parce que l'idée
impériale n'a pas grand chose à voir avec l'impérialisme mercantile et
exploiteur de Washington, à propos duquel le terme de néo-colonialisme est plus
approprié.
La géopolitique distingue clairement et oppose puissance maritime et puissance terrestre. L'exemple le plus
accompli en furent les guerres puniques qui opposèrent la Rome terrestre à
Carthage, puissance des mers. Aujourd'hui, les Etats-Unis, puissance maritime,
sont une nouvelle Carthage accomplie : même consumérisme, même valeurs
marchandes, même horizon limité, même exploitation des colonies, même oligarchie
ploutocratique aux commandes.
La puissance continentale est encore à venir.
C'est contre elle qu'agissent les théoriciens de l'impérialisme américain.
Le choc de Rome contre Carthage est aussi celui de
deux idéologies, de deux Weltanschauung. Hier comme
aujourd'hui.
Du côté des Etats-Unis et des atlantistes existe
une large école ploutocratique pour qui l'Europe doit être un des moyens du
renforcement du capitalisme et de la Mecque de celui-ci qui se situe aux
Etats-Unis. Ce sont les fameuses théories du « second pilier », qui voient
notamment dans une organisation européenne de défense un pilier européen rénové
de l’OTAN. Il existe une autre école, celle de Jean Thiriart ou des eurasistes
russes, pour laquelle l'Eurasie se fera inexorablement contre les Etats-Unis,
pour qui il est impératif qu'elle se fasse contre Washington. Si Thiriart veut
détruire politiquement les Etats-Unis, c'est parce qu'il leur oppose une vision
du monde qui se situe aux antipodes de l'économisme consumériste prôné par
Washington. L'Empire européen est pour lui avant tout une esthétique de l'homme,
une solution et une alternative à proposer à toute l'Humanité.
QUELLE REPONSE POUR LES PEUPLES ?
Depuis plus d'un siècle, Washington se heurte à la
cause des peuples qui ne veulent pas d'une destinée manifeste imposée contre
leur culture et leur liberté. Face à l'anti-civilisation des "chiens heureux" qui pointe à l'horizon
lointain de l'impérialisme yankee, la réponse des peuples est une nécessité
brûlante.
Parce que les Etats-Unis règnent en divisant, elle
implique l'unité et la solidarité des peuples.
Cette problématique de l'unité des peuples face à
l'impérialisme n'est pas nouvelle. En 1967, à La Havane, Castro lançait en
compagnie de la Chine de Mao Zedong et contre l'avis de Moscou la
"tricontinentale". Cette fameuse "Tricontinentale" dont on rêvait à Hanoi où à
la Havane vers 1967, a échoué. Elle n'a pas eu et n'aura jamais la force de
venir à bout de la puissance américaine, même si hier la victoire du peuple
vietnamien a permis de contester celle-ci.
Aujourd'hui plus que jamais, il faut une alliance
quadricontinentale contre l'impérialisme. La seule Europe occidentale détient
aujourd'hui, comme il y trois décennies, des moyens de puissances cinquante fois
supérieurs à la "tricontinentale" (Asie/Afrique/Amérique latine). L'erreur
commise hier à Cuba, à Alger, ou à Hanoi, a été de n'avoir voulu introduire la
révolution que dans les pays pauvres, de ne pas avoir vu qu'il fallait
introduire l'action révolutionnaire dans la colonie la plus riche des
Etats-Unis, l'Europe. Le dogmatisme qui inspirait hier les capitales
anti-américaines au nom d'une solution idéale les a conduit à
l'immobilisme.
La puissance industrielle américaine, renforcée de
la puissance industrielle européenne, fait de celle-ci une super-puissance
mondiale. C'est cette alliance des deux industries mondiales les plus avancées
qui a contraint à la capitulation complète, économique et militaire, une URSS
débile et asphyxiée. L'URSS est aujourd'hui disparue, le mythe communiste est
usé, l'URSS a été battue à plat de couture sur le terrain de l'économie pure par
le néo-capitalisme américain renforcé de sa colonie européenne.
La victoire finale contre les USA ne pourra être
remportée qu’en Europe. Le rôle de l'Europe dans la lutte contre les Etats-Unis
est le rôle primordial, le rôle capital. Pour déséquilibrer le colosse
américain, il faut lui faire perdre son terrain d'action européen.
Au nom de la géopolitique, de la géostratégie et
de la géo-économie, indissolublement liées, Brzenzinski ne nous dit pas autre
chose. Le sort de la superpuissance yankee se joue ici en europe. Et l'unité
entre l'Europe et la Russie est le péril qui lui donne le plus d'angoisses.
Au nom de l'histoire et d'une vision occidentale
de la civilisation et de la culture, Huntington veut nous imposer des "guerres de civilisations". Et si le
choc des civilisations était celui qu'il n'attend pas - ou plutôt ne veut pas
attendre - celui de l'Humanisme européen - qui implique le respect de toutes les
cultures - et de l'anti-civilisation yankee, le Mc
World ...
A L'HORIZON DU
XXIe
SIECLE : L'ANTI-CIVILISATION DES "CHIENS HEUREUX" OU L'"ETAT
UNIVERSEL"
Huntington confond la langue avec la culture, les
institutions imposées en Europe depuis 1918 par la force des armes et encore
plus celle du dollar avec le choix des peuples, le conformisme social et le
consumérisme imposé médiatiquement avec la civilisation.
Depuis quatre siècles, les Etats-Unis sont une
anti-Europe, une machine à récupérer les idées de l'Europe et les retourner
comme armes contre elle.
Comme Huntington, comme Brzenzinski, James Burnham
dans son livre sur "la domination mondiale" a récupéré
une idée née en Europe.
En 1932, Ernst Junger publiait son essai
retentissant et souvent mal compris sur "le travailleur" - Der Arbeiter -, où il prophétisait
l'affrontement final de gigantesques Etats impériaux pour la domination mondiale
et le triomphe de visions du monde antithétiques. Une vision précisée par Junger
dans "L'Etat universel" publié en
1946.
Les thèses de Jean Thiriart sur l'"Etat géo-idéologique", stade avancé de
l'Etat continental géopolitique mettant en oeuvre sa vision du monde, et
publiées dès 1965, s'inscrivent dans la perspective ouverte par Junger.
Fukuyama avec son horizon planétaire uniformisé de
"chiens heureux" aussi. Hélas !
Le choix sera bien celui là. Où le cauchemar
américain imposant aux masses abruties l'illusion du bonheur consumériste. Où
l'Humanisme européen, né en Grèce il y a 2.500 ans, et offrant aux peuples un
destin. Le choc bien réel de l'anti-civilisation yankee - le Mc World - et des
cultures.
Les théoriciens de l'impérialisme américain dans leur arrogance nous avertissent des enjeux qui se jouent. L'avenir n'est heureusement jamais écrit dans les livres mais dans le combat des peuples. On semble l'ignorer à Washington ou à Wall-street. Puissions-nous ne jamais l'oublier !
Luc MICHEL,
Président du PCN.
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